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Alshaïn Pâlelune
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Lun 20 Juil - 21:28
[Histoire] Alshaïn - La Rupture (An 31) Orneva10



Orneval, fin de l'an 31, après le Cataclysme (1/3)



S'équiper, s'entrainer, se battre, veiller, surveiller, rapporter...

Les cycles et éphémérides s’enchaînaient sans que la protagoniste n'y prête attention, ni ne trouve de repos ; la vengeance est un moteur intarissable, à la faveur de la déraison.
Voilà plusieurs mois que Garrosh avait lancé ses assauts en Orneval pour récupérer ses ressources, avant d'entamer sa campagne en Pandarie.

S'équiper, se battre, obéir, diriger, veiller, surveiller, rapporter...

L'avantage des environnements martiaux est que l'on apprend vite que l'ennemi n'est plus digne d'un être vivant, malgré l'aversion de ses comparses pour les meurtres inutiles et tout ce qui atteindrait la Vie.

-"Inepties..." pensait audiblement l'Enfant des étoiles lorsqu'elle songeait à ce sujet, dans sa ronde habituelle aux alentours d'Astranaar, parmi ses consœurs Sentinelles, sans que ces dernières ne relèvent ses murmures. Elles furent toutes bien trop aux aguets.
Que seraient-ils d'autre que des bêtes aux défenses acerées, aux grognements bestiaux et à la soif de sang insatiable. Pour elle, ils étaient toujours corrompus. A quoi bon laisser la vie à quelque chose qui l'atteignait arbitrairement ? A ceux qui assassinent nos demi-dieux ?


S'équiper, se battre, obéir, diriger, veiller, surveiller, rapporter...


A défaut ne pas paraître folle à lier d'effectuer son travail robotiquement, elle prenait la mauvaise habitude de passer outre le regard de sa génitrice et supérieure pour patrouiller seule pendant ses temps de repos.

-"Une Estafette se devait de travailler seule"  se répéta-t-elle, si elle fut compagnon plus sérieuse dans son ancien travail, elle était autant effrontée.

L'elfe n'avait plus son refuge, son village de naissance, le refuge de Vent-Argent où elle côtoyait amis, amant de toujours, et œuvrait à ses activités plus légères. La ville d'Astranaar se soignait encore des dernières attaques de la Horde, la vue de ses consœurs et des familles déchirées devenait insupportable, tout autant que la tension ambiante et les harcèlements répétitifs de la faction adverse. La construction d'avant-postes continuait.

Aux derniers rapport de la mise en esclavage des furbolgs locaux au refuge de Vent-argent, elle eu vent d'ordres de monter une escouade pour en libérer quelques uns et semer une discorde et une mutinerie interne.
Elle savait qu'elle ne serait pas dépêchée sur place, Nevantia la trouvait trop impliquée émotionnellement, et ce fut le cas. Alshaïn avait autant l'avantage que l'inconvénient d'avoir une proche haut-gradé au sein des Sentinelles, mais le Lieutenant se voulait sévèrement impartial.

Néanmoins contrariée, il fallait qu'elle parcourt le même chemin que ses quatre derniers siècles, les mêmes sentiers, les mêmes branches, les mêmes arbres, il n'y avait que la vie qui changeait le portrait de ses forêts, et fort heureusement, le Cataclysme n'avait pas touché à son parcours habituel. Elle pouvait effectuer le trajet les yeux fermés - et c'est d'ailleurs ce qu'elle fit dans sa jeunesse et ses formations.
Il fallait qu'elle aille observer une nouvelle fois les silhouettes orcs, gobelines, réprouvés qui se promenaient dans son village.

"Ils n'ont pas fait de prisonniers, ils ont tout été abattus".  

Alshaïn gardait l'effrontement qu'ils avaient pu être prisonniers quelques part, qu'ils auraient pu échapper, ou, pour le moins, apercevoir leur corps se faire traîner pour en avoir le coeur net.

Mais c'est l'odeur de viande d'ours brûlé qui l'interrompit dans sa course habituelle d'Estafette, sous un ciel couvert, une nuit sans Lune ; elle aurait pu y voir un présage supersiticeux, mais la Kaldorei n'y prêtait plus attention.

Quelque chose d'inhabituel s'était installé entre deux collines, sur la route.

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Lun 20 Juil - 21:29
Orneval, fin de l'an 31, après le Cataclysme (2/3)


...les rires gutturaux, la langue hachée et crachée, les propos toujours aussi affreux lui remontaient jusqu'à l'oreille, si la langue Orc pouvait sonner belle pour certains, ce n'était pas son cas. Mais, à son grand dam, elle la comprenait :

-"Gol'Kosh! Tu vas nous faire repérer, abruti, garde la viande pour le retour."


Un orc massif s'adressait à un Grunt, qui ne se contentait pas des rations basiques de la horde et avait amené un ours entier, qu'il s'était affairé à faire cuir. Ils étaient installés dans à côté d'un campement de fortune, caché entre deux racines géantes, à l'abri des regards des patrouilles aériennes, une tente aussi sommaire était plantée ; le camp était à mi-chemin entre les deux points stratégiques de l'Alliance et la Horde : Astranaar et le refuge de Vent d'Argent.
Le regard d'Alshaïn se planta bien rapidement sur les paires d'oreilles à la ceinture du Guerrier, d'une mine de dégoût, les orcs étaient réputés pour les garder en trophée.

-"Et enlève-moi ce tas de bois, ça fait de la fumée ! Il fallait qu'on récupère un grunt..."


... Ce furent les derniers mots que la Kaldorei avait entendu. Ses paupières s'ouvraient lentement, son coeur battait dans son crâne et heurtait sa cervelle, elle n'entrevoyait que le tissu de la tente et un alambic où traînait le fond d'un elixir distillé -de l'alchimie improvisée- et ne sentait que la terre fraiche sous son corps.
Ce n'est que l'odeur pestinentielle qui lui fit tourner la tête endolorie : un cadavre inerte d'un druide de la serre gisait à côté, probablement pris dans son chemin d'estafette. Le camp improvisé servait à intercepter les messagers et les informations importantes. Pour son cas, c'était plutôt réussi, aussi idiote était-elle devenue pour sortir au-delà du cadre de ses fonctions.
Elle était trop sonnée pour entendre et appréhender quoique ce soit, ni moins savoir depuis combien de temps elle était là, ni ce qui lui était arrivée.

Une nouvelle douleur aiguë sous sa hanche la fit cracher un râle de douleur, étouffé par une main pâle d'où ressortait des os décharnés, jaunis, pourris. Un réprouvé lui avait planté une dague dans le bas de son ventre.

-"Garde la en vie" grondait l'orc dans sa langue natale, dont elle n'entendait que la voix* Vu sa taille, elle ne sera pas bien féroce. J'ai trouvé un parchemin en orc dans son armure.
-"Interroge-la."

Le Réprouvé ne perdit pas de temps : c'est en enfonçant sa lame jusqu'à la garde qui lui tenit les cheveux pour l'interroger, l'haleine pourrie lui frappait au visage :

-"Alors ma jolie... T'es pas très farouche pour une informatrice."

Elle ne lui répondit qu'un crachat au visage, ses liens -dont le corps endolori avait fait abstraction- l'empêchaient de se débattre. Le mort-vivant provoquait, il remuait le couteau enduit de poison, dans la plaie. L'odeur d'une plante lui revenait déjà aux narines, le sang coulait sur son front et la chatouillait, elle n'était qu'à peine lucide.

-"Maintenant écoute-moi bien... Chaque secondes que tu perds à me lancer ta salive elfique seront une chance de moins pour ta jolie descendance. Si tu arrives à survivre à mes interrogatoires." Il poursuivit qu'un rire glauque*
-"Quand est la prochaine patrouille pour la flèche de chimétoile ?"

La douleur à la hanche et celle à son crâne devenaient déjà insupportable, elle ne pouvait qu'en lâcher des râles : le mort-vivant tournoyer sa lame vers le bas de son ventre, toujours, elle ignorait les effets du poison, si ce n'est accentuer la douleur.
S'en suivie une série de question, dont l'elfe n'écoutait même plus l'intitulé, elle n'avait même plus aucune raison de résister pour succomber. Il aurait été plus aiser, sa volonté lui aurait fait peut-être lâcher des informations malgré elle. Non. Elle se laissait mourir, peu lui importait, elle pourrait les retrouver parmi les étoiles, pensait-elle. Elle errait dans une semi-inconscience, l'écho de la voix du Réprouvé se faisait de plus en plus lointaine, elle se sentait plus légère, elle n'entendait qu'une douce mélodie, une chaleur empli d'amour à côté d'elle, c'est dans un état de béatitude qu'elle entrait. Sombrait-elle à la mort depuis une seconde, dix minutes, dix heures ? Plus aucun concept du temps, elle sentait déjà son âme se détacher, partir auprès de ce qui attendent les Kaldoreï après la mort... Ou seulement était-ce une hallucination provoquée par les poisons.


Une nouvelle douleur aiguë, les yeux grands ouverts, elle était attachée, mais assise, cette fois-ci. Elle compris que le Réprouvé était bien décidé à la réveiller lorsqu'une brûlure se fit sentir dans son dos, ainsi que le bout d'un fouet frapper contre la toile de la tente. A bout de respiration, son corps a dû râler, grogner et réagir aux tortures sans que son esprit suive, ce ne sont que des souffles épuisés qui sortaient de sa bouche : elle ne suppliait pas. Un duel d'honneur aurait été de meilleure chance pour elle, gagné ou pas, elle aurait probablement moins souffert. Elle n'avait plus aucune notion du temps : dix ou trente, cent coups de fouets et de lames ? Sa vision s'était à peine ouverte lorsqu'il lui montrait son confrère décédé, les oreilles en moins. Si le réprouvé tentait de la pousser à bout, c'était d'ores et déjà impossible : la Kaldorei avait déjà abandonné son esprit. Si tôt.

Laisser mourir les boites à secrets des déplacements stratégique serait cracher sur du pain bénit en période de famine et maladie, elle ne pouvait se souvenir que du temps de répit donné par le Réprouvé. Elle était de nouveau allongée, quelques instants de conscience lui ont fait entrevoir la tente, sa taille bandée et parsemée d'un liquide verdâtre, les mouvements de l'orc à côté d'elle qui reunissait ses armes et les objets du campement provisoire de fortune. Elle ne savait même pas combien de temps elle était restée inconsciente.
L'orc n'y prêtait nullement attention, bien trop pressé pour sembler partir à la va-vite. Ce n'est qu'en entendant un bruit immonde et un grunt qui hurle pendant bien plusieurs minutes qu'elle s'est mise à fixer l'entrée. Une souche lui arrivera au visage, accompagné d'un souffle qui la fit dégager au loin, puis, plus rien.

La Chance.

Il fallait qu'elle ait de la chance pour que le duo d'Orc et de Réprouvé doivent récupérer un grunt qui possédait un de ces explosifs gobelins instables. Les deux orcs étaient à terre, le Réprouvé, lui, envolé. Blessé ou mort, elle ne pouvait le savoir, la Kaldorei n'était plus bonne cliente à la torture et aux confessions pour être emmenée, peut-être, ce n'était que la seule logique qu'elle avait trouvé. Elle se laissait retomber sur le dos en fixant la Grande Dame, elle ne pouvait plus localiser la douleur, tant elle était générale, elle sombrait à nouveau dans son inconscience. Le temps lui aurait semblé un millénaire tout autant qu'une nuit. La Chance, de nouveau, pour que ce soit des troupes de l'Alliance qui interviennent avant la faction adverse.

La prochaine lueur qui lui parvenait jusqu'à ses billes argentées était celle des plafonds familiers des chambres de Darnassus, cette fois-ci.

"Une trentaine de nuits d'inconscience..." "... possible" "...le dos." seront les premières voix qui l'ont réveillée. Une voix familière : elle était celle de sa mère.
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Lun 20 Juil - 21:29
Orneval, fin de l'an 31, après le Cataclysme (3/3)



Il fallu à l'Enfant des étoiles bien la moitié d'une journée pour trouver la force de se lever, quoique la nuit éternelle de Darnassus ne laissait que peu d'interprétation du temps, sa tête la heurtait toujours à chaque battement de coeurs, son dos et le bas de son ventre étaient à peine supportable. Elle n'osait ni se regarder en-dessous les bandages, ni même croiser un miroir. Son corps couvert de bandages lui donnait la vague impression de ne plus être elle-même, sans la présence de Nordrassil, les guérisons étaient plus lentes, les maladies existantes. Un vague sentiment de malaise l'envahissait, elle était certaine d'être elle-même, sans pour autant d'avoir été celle qu'elle était.

Les discussions et les voix familières se sont tues il y a plusieurs heures déjà, Alshaïn avait réussi à se tenir debout après plusieurs tentatives, soutenue par un bâton, au bord du mur absent de la chambre où elle se situait, qui lui donnait la vue sur une bonne partie de la ville. C'était la première fois qu'elle venait à Darnassus depuis le début du Cataclysme ; et sa vue se sera ineluctablement arrêtée sur les nouveaux réfugiés : Les Gilnéens et les Bien-nés. Elle aurait bien voulu aller s'approcher, malgré les apprioris que l'on lui a inculqués, mais sa convalescence l'empêchait d'aller plus loin. Elle en restait là, à les observer, les rumeurs des ordres de Tyrande étaient donc vraies : elle en méditait l'utilité pendant plusieurs heures, l'isolation lui avait été forcée, voilà quelques temps qu'elle admirait l'utilité de l'ouverture, sans pour autant l'admettre elle-même, tiraillée entre son éducation, ses valeurs, sa culture et ce qui lui semblait, de toute évidence, utile. Elle ne comprenait pas ce sentiment de haine, de mépris latent qui en ressortait, de ses consoeurs d'Astranaar, pour une Alliance choisit par leur grande prêtresse et pour leur aide apportée. C'était un humain qui lui avait appris la langue commune, mais les regards méprisants et les jugements latents lui avait réprimé ses envies de curiosité, elle se contentait d'apprendre ce qu'il y avait à apprendre. C'est le bruit de pas, d'une entrée, qui la tira de ses songes.


-"Alshaïn."

La voix familière de sa mère résonnait jusqu'à ses oreilles. C'est dans des efforts incomensurables qu'elle réussit à faire volteface. La Sentinelle Ombreciel en imposait : elle était aussi grande que vénérable, par sa posture, son armure complète de militaire gradée, son air si parfaitement maîtrisé. Elle peinait à distinguer si elle venait en mère ou en supérieure, sur l'instant, sa voix ne trahissait aucune émotion si ce n'est d'une neutralité déconcertante. Celle qu'elle avait appris à copier.

-"Min'da." rétorquait-elle, la vision troublée par la fatigue.

-"Je suis rassurée de te voir sur pieds, mais tu ne devrais pas te tenir debout. La druidesse en était formelle, tu en auras pour quelques cycles de lune, notre feu Nordrassil ne peut nous aider à nous remettre sur pied plus aisément, sais-tu."

-"Je le sais." d'une voix monotone. De toute évidence, elle ne savait plus ce qu'il s'était passé exactement, ni même comment elle était arrivée ici ; elle ne savait plus si sa vie était encore légitime, ce n'était pas dans son code de survivre par chance.

-"Nous avons envoyé des éclaireurs pour retrouver ta trace et celles des autres. Il en était devenu évident que la Horde avait envoyé des détracteurs et ouvert un camp furtif pour intercepter nos coursiers."

Alshaïn détourna le regard vers la ville, à nouveau, d'un pincement au coeur. Peut-être aurait-elle voulu entendre que sa mère était partie à sa simple recherche sans arguments de sa vie militaire.


-"Je vois". réussissait-elle à répondre seulement, une pointe d'amertume dans la voix. Après un long silence, sa mère reprit, d'un masque de calme :

-"J'espère que ton repos t'as été bénéfique pour te reposer sans rêves et pour apprendre de tes erreurs d'impulsivité. Je ne vais pas te blâmer pour ce que tu as fait, Alshaïn, à ton âge, j'aurai fait le quadruple de tes erreurs. Nous pourrons discuter de ce qu'ils t'ont fait, de ce qu'il s'est passé, lorsque tu seras suffisamment prête. Tu sais que je garde toujours une oreille attentive."


-"J'ai toujours eu bons souvenirs de la plupart de mes rêves." L'oreille d'Alshaïn, elle, était sélective. Elle n'avait ni la volonté, ni l'envie de se remémorer ce qu'il s'était passé, son esprit était encore embrumé. S'ouvrir à sa mère était d'autant plus difficile, si elle l'a admiré pendant le trois-quart de sa vie, c'était en qualité de sentinelle plutôt que de mère, et pour cause, la fille était toute aussi renfermée que la mère.

-Est-ce le cas ? Je ne crois pas t'avoir entendu me les conter."

-"Parce que je les racontait à An'da. -Il- s'occupait de mes réveils, au refuge."
disait-elle sur un ton acerbe, aux teintes de reproches. La Sentinelle ne le dénotait pas, si elle était incapable de réparer son absence latente, de part ses fonctions, s'emporter n'aidera rien à sa situation."

-"Il m'en disait plus que tu ne le pensais. Les rêves s'estompent au fil des années et de l'expérience."


-"Ce n'est pas mon cas. L'absence de rêve est pour les esprits pessimistes."


-"Rêverai-tu encore ?" De toute évidence, la sentinelle se forçait de bonne foi à la discussion. Les mots et les bavardages n'étaient plus son fort, elle en était bien consciente

-"Encore, oui. Même aujourd'hui je rêve, et j'ai peur des rêves qui viennent à moi.


Elle s'interrompit sans que sa mère ne réponde ni même croiser son regard, avant de lâcher prise et continuer simplement :
-"A travers eux, je me souviens d'horreurs qui ne devraient pas être, que je n'aurais pas dû voir, que vous ne m'avez pas -et tu ne m'as pas- entrainée à voir. Des horreurs que j'essaye d'oublier quand je suis éveillée. Mais les rêves continuent d'apparaître."

-"A quels rêves fais-tu référence ?"

-"Dans mes rêves, je suis à peine sortie de mon premier siècle. Je marche à travers une grande forêt, en tout point parfaite. Les Sentinelles se déplacent dans les bois, nos guerriers éliminent les prédateurs, les proies lorsque l'Equilibre est nécessaire, les feux follets bâtissent des nouvelles maisons pour des heureux événements. J'entends des chants au loin, ceux des femmes, hommes et enfants, père et mères qui expriment leur amour et leurs remerciements à Elune pour notre paix et notre prospérité. Je marche à côté de l'homme que j'aime, l'homme que j'ai juré de protéger sur ma vie, l'homme à qui j'ai juré l'Eternité. Il me sourit, et je me perds dans les profondeurs et les afres du temps à travers son regard."

Alshaïn se permet une pause, tandis que Nevantia attend patiemment la suite, un sourire discret trône sur ses lèvres, entre la nostalgie et la bienveillance, même si sa fille ne la regardait pas. Elle réprimait un commentaire nostalgique, la perte de son mari et de son beau-fils l'avait atteint plus qu'elle ne le montrait, par envie de protection envers sa fille.

-"C'est un monde parfait. Un monde où nous vivions. Mais le changement est inévitable. Je vois ensuite les bois autour de moi s'assombrir. Les arbres se tordent de douleur, et du sang rougeâtre s'écoule des horribles entrailles qui s'ouvrent devant moi. Les créatures se tournent vers nous, et elles chassent ceux qui les éliminaient autrefois, malades et folles de douleur. Les chants, les belles chansons, deviennent des cris d'horreur et de douleur, des plaintes qui me suivront dans mes moments éveillés."

Elle se permit une nouvelle pause.

-"Je me tourne vers mon amour, pour le soustraire à cette horreur, et je m'arrête alors que mon cauchemar s'amplifie pour entrer dans son pire instant. Devant moi se tient une image hideuse portant le visage de l'homme à qui je me suis donnée. Un visage déformé par la mort et la corruption, ses bras et ses jambes sont velues. Ses pieds sont devenus de rudes et cruels sabots. Tandis que je l'observe, il lance un poignard courbé avec un sourire malicieux et des yeux ardents, et le plante dans ma poitrine."

-"Ma fille... Je ne savais pas, pour ces rêves."

"-Mais parce que vous êtes tous aveuglés."


répondait-elle avec un effrontement d'enfant, des paroles amères qui résonnaient aux oreilles de sa mère. Nevantia prenait toujours le temps de répondre, pour que ses mots accordent justement sa pensée ; aussi injustes ses pensées puissent-t-elles êtres aux yeux de sa fille, mais c'est cette dernière qui repris la parole sans lui laisser l'occasion d'en répondre :

-"Le changement est inévitable, Min'da. Nous vivions autrefois dans un monde isolé des autres, j'étais isolée de la douleur, de l'horreur de vos guerres avant de les vivre moi-même, de la vieillesse, de la maladie. Je n'ai pas connu toutes vos grandes guerres. Vous croyiez avoir gagné celle-ci, vous croyiez que nous n'aurions jamais à affronter ces abominations grotesques encore une fois. Mais je me tiens devant toi, Min'da, et je te dis à tous que nous ne pouvons plus être isolés et qu'il s'agit là de la pire des erreurs. Bite. Nous devons rejoindre nos cousins, les gnomes que tu détestes tant, les nains explorateurs, les maudits que tu rejettes tant malgré les ordres de Tyrande. Rejoindre les humains étranges qui sont entrés dans nos forêts. Nous devons apaiser la douleur, pas seulement de notre monde, mais d'Azeroth entier. Le mal qui se présente dans nos terres ne se résoudra pas en les affrontant directement et bêtement. Ce n'est pas ici que l'on connaîtra la fin de la Horde et de la Légion.

Alshaïn enchainait les paroles piquantes, comme si on l'avait retenu de parler pendant si longtemps. Elle ne ralentissait que pour finir :

-"Nous le devons, afin que je puisse faire des rêves paisibles de belles forêts et d'enfants encore plus beaux, à nouveau."

-"L'Alliance n'est présente en Kalimdor que lorsque leur intérêt direct est touché, Alshaïn. Ce n'est pas en quittant nos forêts que tu vas les défendre, tu devrais saisir l'absurdité de tes propos.

-"Je te dis que c'est le cas."


Nevantia en répondit d'un long soupir, celui de voir un enfant s'éloigner de ce qu'on a tenté de lui éduquer -aussi juste ou non cela soit-il- et celui de constater, en connaissant assez sa fille, qu'elle ne pourra que difficilement lui ôter l'idée de la tête. Elle enchaina.

-"Ta place n'est pas faite auprès d'eux. Une enfant des étoiles qui ne combat pas sur ses terres sacrées, offert par la Déesse-Mère et qui ne suit pas les troupes de la Grande Prêtresse n'est plus une Enfant des Etoiles, écoute-toi un peu, tes propos seraient dignes de creux qui ont perdu la raison par le fardeau que porte notre race, n'émet pas de doute que tu te sentiras rejetée en les affirmant ainsi. Tu devrais prendre un temps pour y réfléchir lorsque ta tête te heurtera moins, nous en reparlerons.
Maintenant repose-toi, je veux te voir en forme pour discuter de ce qu'il t'est arrivé, du sujet des nouveaux venus et de l'avenir de tes fonctions au sein des Sentinelles."


Aussi durs soient ses propos, Nevantia en restait calme et stoïque : mélanger la relation familiale et l'environnement était loin d'être aisé et menait souvent aux maladresses. Et c'en fut une : Alshaïn la regardait partir sans connaitre sa destination, en constatant d'elle qu'elle n'éprouvait aucune compassion ni aucune empathie, elle ne faisait qu'attiser la rage déjà présente.
Et pourtant, sa mère se dirigeait vers le Temple d'Elune, demander conseil aux prêtresses de Darnassus sur l'aide qui pourrait lui être apportée, elle faisait toujours en sorte de veiller sur son bien-être dans l'ombre ; Nevantia avait préféré coupé court, par expérience, elle avait trouvé ce choix plus légitime et optait pour la cure du temps.
Son père était un artisan du Refuge de Vent-d'Argent, un Kaldorei sage et plus prompt à l'ouverture et à l'humour qui la caractérisait tant ; il instaurait l'équilibre dans leur relation, mais il n'était plus. Fyldren, l'homme à qui elle s'était offert, n'était plus de ce monde non plus, ainsi que la plupart de ses proches. Elle ne trouvait plus le réconfort de son point de vue auprès de la seule personne qui lui restait, c'en fut bien assez pour elle pour prétendre une fausse excuse à la druidesse qui effectuaient ses soins pour rassembler le peu d'affaires qui lui vinrent sous la main dans les nuits qui s'en suivirent.

C'est en direction du port de Rut'theran qu'elle partit sous couvert de sa capuche et de sa cape, sans laisser un mot de plus pour le peu de personnes sur qui elle comptait, ni sur ses fonctions d'Estafette chez les Sentinelles, toute trouvées, et pourtant dans des accomplissements relativement singuliers pour son âge. Sa mère avait veillé à ce qu'elle suive des formations parfaites.
Le bateau menait aux Royaume de l'Est, la Kaldorei ne savait pas vraiment où elle se dirigeait, ni même dans quelle ville et quelle culture elle partait. Elle avait réprimé son instinct pendant assez de temps pour réfléchir à deux fois à son geste. Nevantia, elle, ne se sera rendue compte de son absence qu'en revenant dans une chambre vide en compagnie d'une prêtresse d'Elune, sa fille volatilisée.
Si elle savait que le bateau en question allait faire sa première escale à la Baie-du-butin...


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