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Au cœur du brasier Empty Au cœur du brasier

Mar 7 Juil - 15:25
Fhyren... Fhyren... Fhyren... Fhyren... Fhyren... FHYREN !




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Un bruit assourdissant. D'abord la chaleur, puis la douleur. Comme un millier d'aiguilles mordant la peau, s'enfonçant dans la chair, le feu enveloppa le kaldorei jusqu'à l'engloutir dans le brasier de l'explosion. L'obscurité presque immédiate après le flash de lumière chaude. La sensation de léviter, s'envoler puis s'écraser. Un choc. Puis plus rien. Seule la douleur, persistante, lancinante. Le feu qui irradiait dans chacun des membres de l'elfe s'atténua, lentement, pour laisser place au froid. L'absence de sensations.

Vais-je mourir ? Elune, est-ce mon heure ? Je t'ai servi du mieux que j'ai pu... M'accepteras-tu auprès de toi ?



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- Je vais prendre le relais. Vous avez besoin de repos vous aussi mon frère. Ne vous inquiétez pas, je vais veiller.

Oriev accompagna ses paroles d'un doux sourire à l'attention de Ylraen. Cela faisait plusieurs heures maintenant que le prêtre d'Elune veillait au chevet de Fhyren. Doté d'une carrure plutôt mince en comparaison des siens, de grands yeux dorés brillaient sur un visage marqué, encadré par une barbe fournie et une chevelure mi-longue dont les tons rappelaient les bois d'Orneval qui l'avaient vu grandir. Son air calme et accommodant était à peine amoindri par la fatigue qui se lisait dans son regard. Ylraen était un peu plus âgé que le moine qu'il veillait. La moitié d'une vie humaine, guère plus. Fhyren et lui semblaient avoir beaucoup en commun, à commencer par cette bienveillance innée.

Une bienveillance que partageait aussi la druidesse qui se tenait devant le prêtre. Oriev posa une main compatissante sur son épaule et se pencha pour lui tendre un bol de kimchi chaud. Quelques mèches de cheveux cyan aux reflets menthe glissèrent devant son regard de nacre tandis qu'elle appuya son sourire.

Plus petite que ses congénères, Oriev jouissait néanmoins de proportions tout à fait respectables; et d'une forme physique et esthétique entretenue par un entraînement régulier. De larges marques faciales s'étiraient sur son visage, symbolisant, à l'évidence, la grue : dévotion, patience et guérison. Un choix de vie qui se reflétait dans chacun de ses actes, chacun de ses gestes.

- Qu'Elune accompagne votre veillée. Je vous remercie ma sœur, souffla le prêtre en acceptant le repas offert.

Ylraen remercia la druidesse et se releva pour lui céder sa place. Il accorda un dernier regard au lit dans lequel reposait le moine meurtrie : ce dernier était méconnaissable. Aelendil, l'alchimiste de l'enclave, avait pris soin d'envelopper l'intégralité du corps de l'elfe dans des bandages gras. Sous les pansements, elle avait recouvert chaque parcelle de peau brûlée d'onguents fortifiants, de baumes et de potions cicatrisantes. Aucune piste n'avait été négligé et Aelendil avait utilisé bon nombre de produits du comptoir afin de soulager les maux de Fhyren.

Confiant à l'idée que Oriev prenne le relais, Ylraen se dirigea vers les escaliers à la lueur des bougies et des lanternes suspendues dans le dortoir avant de gagner le rez-de-chaussé pour profiter de son repas et d'un peu de repos.

La druidesse se tourna vers le moine, assise sur son tabouret. Seule la longue chevelure pourpre avait été épargné par le travail digne d'une tisseuse faldorei d'Aelendil. La kaldorei écarta doucement de ses petits doigts fins quelques mèches des bandages. Un soupir s'échappa de ses lèvres émeraude. Elle ne savait pas si elle devait être inquiète ou soulagée. Fhyren n'était pas mort, voilà l'essentiel, mais il avait une fois de plus payé le prix fort. Elle savait qu'il ne pouvait en être autrement, que c'était la voie qu'avait choisi le moine, celle de se dresser en rempart entre les membres de l'Enclave Lunaire et leurs ennemis. Ils avaient tous les deux renouvelés leur vœux de protéger le peuple kaldorei et elle aurait certainement agit elle-même de la sorte dans une situation similaire.

Néanmoins, elle sentait une légère crainte croître en elle. Une tension, une sensation ténue qui se faisait de plus en plus forte à mesure que le temps passait. Une canine acérée se dévoila tandis qu'elle se mordit légèrement la lèvre inférieure. Elle prit une nouvelle inspiration pour rassembler ses esprits et tendit ses mains au-dessus du corps momifié de Fhyren.

Elle ferma les yeux et une lueur verte commença à s'échapper de ses doigts, puis de ses paumes, s'étirant doucement pour venir envelopper le moine allongé. Tandis qu'elle faisait appel aux bienfaits de la nature, une pensée fugace s’immisça dans son esprit : et si cette crainte cachait un sentiment nouveau ?


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Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis les premiers événements de Zin-min'danor. Hélas, piégé de son corps meurtri, trop épuisé pour ouvrir les yeux plus de quelques minutes, Fhyren avait perdu toute notion de temporalité; il aurait été bien incapable de deviner depuis combien de temps il était alité.

Difficile de savoir si c'étaient ses sens qui s'étaient mis en éveil mais il avait pu sentir nombre d'allers et venues autour de lui. Il avait tenté plusieurs fois de s'excuser de son état, de remercier ses bienfaiteurs, sans qu'il n'ait eu assez de force pour qu'un son s'échappe de ses lèvres. Si sa nature de moine et serviteur d'Elune ne l'avait pas habitué à une dévotion totale, il aurait certainement ressenti de la gêne et de la honte de mobiliser ainsi autant de ses congénères. Il savait néanmoins que ce qu'ils faisaient depuis des jours, il l'aurait fait aussi volontiers, sans une once de contrainte. Semblable à une meute de sabre-de-nuits, les membres de l'enclave veillaient les uns sur les autres sous l’œil attentif de leur matriarche.

Des animaux, des signes, Fhyren en avaient côtoyé beaucoup au début de sa convalescence, lorsque la fièvre l'avait plongé dans un état comateux. En proie au délire, il avait rêvé deux jours durant. Les druides d'Orneval, les premiers à le prendre en charge sur les ordres d'Alshaïn, avaient fait leur possible pour soigner ses blessures sans parvenir à apaiser les cauchemars alimentés par la douleur.

Fhyren se voyait piégé des flammes, encerclé par un brasier tonitruant. Nulle échappatoire. Ses frères et sœurs gisaient à ses pieds, vaincus. Il était le seul survivant. Au loin derrière le rideau de flammes se détachaient deux ombres : la silhouette d'un ours immense, féroce, hurlant de rage, et celle d'une prêtresse dont le regard froid et inquisiteur contrastait avec la chaleur étouffante de la fournaise. Ils avançaient, proférant des reproches que le moine ne parvenait pas à entendre mais dont il devinait pourtant aisément leur sens.

Et puis, soudain, alors que les deux présences s'apprêtèrent à pénétrer le cercle de feu, une troisième silhouette jaillit du ciel. Un oiseau de proie immense aux traits changeants qui, d'un mouvement d'ailes, souleva une bourrasque si puissante qu'elle balaya les flammes et fit disparaître les ombres menaçantes. La force du vent dispersa l'épais nuage de fumée noirâtre, dégageant alors le ciel pour dévoiler une lune resplendissante dont la pâleur argentée était teintée d'étranges reflets dont les tons rappelaient les bois d'Orneval.

Une louve au pelage bleuté quitta la pénombre pour s'approcher du kaldorei esseulé avant de bondir et détaler au galop, l'écume à la gueule, comme si elle partait en chasse des silhouettes inquisitrices, disparaissant dans des ténèbres sans fin. Plus étrange encore fut l'apparition d'un simple chat; le félin au pelage cendré semblait presque intangible, comme s'il pouvait disparaître d'un instant à l'autre. Il se tenait aux côtés d'un corbeau au ramage d'un vert éclatant et dont les serres étaient aussi acérées que des dards.

Fhyren, incapable de bouger, ne pouvait que contempler ce spectacle onirique. Il sentit néanmoins ses genoux trembler; mais alors qu'il s'apprêtait à chuter sous le poids de son propre corps et du désespoir, il se rattrapa de justesse à une silhouette gracile, surgit de nulle part. Il tourna la tête pour apercevoir le plumage cyan aux reflets couleur menthe du volatile qui venait de le soutenir. Une grue majestueuse qui n'avait rien à envier au grand et terrifiant oiseau de proie apparu quelques secondes plus tôt. Il voulait parler, les remercier, mais il lui était impossible de communiquer. Aucun son ne sortait de sa bouche.

C'est alors qu'un autre mouvement attira son attention. Un sabre-de-nuit se tenait fièrement sur un rocher dont il n'avait jusqu'alors pas remarqué l'existence. Le pelage d'un blanc immaculé, quelques marques d'un violet pâle encadraient son museau. Il observait la scène d'un œil à la fois espiègle et bienveillant, joueur et maternel, surplombant cet étrange rassemblement.

Fhyren cligna des yeux. Une seule fois. Ce fut suffisant pour que tous disparaissent. Les silhouettes se volatilisèrent dans un brouillard éthéré. Tout devint noir. Le moine flottait dans le vide, voguant au milieu... du rien. Mais, alors que l'angoisse gagnait à nouveau son esprit, qu'un cri silencieux tentait de s'échapper de ses poumons, son regard se posa sur une nouvelle apparition, la dernière : celle d'un buffle au regard décidé, à l'aura de courage, à l'allure dévouée.
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